David Lynch, Pinacothèque, Google… tout le monde parle du graffiti

jeudi 26 mars 2015, par Stéphane Rousset.

Nous sommes en 2015 et le graffiti fait toujours débat. Apparu au début des 70’s, l’art vandale a depuis conquis la planète et on le croise partout. Au grand dam de David Lynch, si l’on en croit ses récents propos. Au détour d’une conférence de presse à Brisbane il y a quelques jours, le cinéaste, peintre de formation, s’est fendu d’un avis lapidaire à l’encontre des writers qui défigurent de potentiels décors de films. «Selon moi, le graffiti a beaucoup abimé le monde ». Rien que ça. Et d’ajouter « Quand tu veux filmer un lieu, tout est tagué, donc si tu ne veux pas des tags, tu dois tout repeindre. Tant de bâtiments aux superbes architectures ont été tagués, tant de gares magnifiques, d’usines, ont été taguées, c’est quelque chose de vraiment terrible ». Dur. Une opinion toute en nuance qui rappelle celle de l’autoproclamé « réac et fier de l’être » Eric Brunet, de RMC. Lui, préférait parler de « massacre » et de « tragédie » avant d’exhorter les graffeurs à « envoyer des cv à Pôle Emploi et cesser d’enlaidir nos vies». Il faut dire qu’il a carrément « envie de pleurer » quand il croise un tag au sortir de son parking. Un homme qui pèse ses mots, assurément.

 

«Selon moi, le graffiti a beaucoup abimé le monde »

David Lynch

Dans le coin opposé du ring, se tient la Pinacothèque de Paris, qui abrite jusqu’au 13 septembre une exposition intitulée « Le Pressionnisme, les chefs d’œuvre du graffiti sur toile ». Où l’on découvre les origines  du mouvement au travers des œuvres de Rammellzee à Dondi White, en passant par Futura ou Phase 2, sans oublier les icônes que sont devenus Keith Haring ou Jean-Michel Basquiat.

Marc Restellini, le directeur de la Pinacothèque, ne fait pas plus dans la demi-mesure, et n’hésite pas à comparer ceux qu’il appelle « les pressionnistes » de la fin du 20ème siècle aux impressionnistes de la fin du 19ème. Une approche selon laquelle la mentalité de groupe des graffeurs s’oppose frontalement au reste de l’art contemporain, perçu comme bourgeois et rongé par l’individualisme et l’ambition personnelle. Pour Marc Restellini, « aucun décideur culturel n’a compris que la scolastique était de retour et qu’une révolution silencieuse était en marche ». A part lui, donc.

Cherchant à tirer parti de son rôle d’arbitre, Google non plus n’est pas en reste. Le 17 mars dernier, le géant a doublé la base de donnée de sa plateforme Street Art Project, passant de 5000 à 10000 œuvres répertoriées. On y trouve également 260 expositions virtuelles. L’idée, c’est à la fois de permettre à n’importe qui de contempler depuis son ordinateur ou son smartphone les créations de plus de 3500 street artists sur les 5 continents, mais aussi de les géolocaliser pour permettre à ceux qui le souhaitent d’aller les voir de leurs propres yeux. Sur ce qui va ressembler au plus grand mur virtuel de graffiti du monde, les artistes s’offrent une visibilité planétaire inédite et peuvent dans le même temps sauvegarder leurs oeuvres, éphémères par essence. On y trouve également des « gif-tis », et des visites audios de hauts lieux du street art.

A croire que sortir dans la rue et ouvrir les yeux ne semble plus être le moyen le plus simple de se faire son propre avis sur le graffiti…

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