« Os Pixadores », plongée au cœur des yamakasis du graffiti brésilien

mercredi 6 mai 2015, par Ken Fernandez.

« Risk something important…Freedom. » Bien plus que de l’art, le pixação se définit comme une façon de penser, une identité. On est retombés sur le court-métrage de Ben Newman, « Os Pixadores », réalisé en 2012 pour la sortie de la collection ASOS X Puma en se disant qu’on se devait de le partager avec vous, malgré le risque de redite. Cette virée cinématographique et poétique auprès de ces graffeurs acrobates de Sao Paulo, gardiens d’un art authentique, nous a touché par sa mise en lumière réelle et exaltante des risques extrêmes courus par ces jeunes artistes, ignorés par la société, se transformant en yamakasis pour donner voix à leurs préoccupations.

Ben Newman a du passer beaucoup de temps à la recherche des pixadores dans les favelas les plus violentes de la ville avant de rencontrer et convaincre certains de ces junkies d’émotions fortes de l’initier à leur monde. Sao Paulo est devenu depuis les 80’s un haut-lieu de la scène street-art mondiale. Une vision de l’art contestée par le pixação depuis qu’il a vu le jour dans les années 60’s dans la mégalopole. Équivalent du tag sauvage et transgressif, c’est avant tout l’adrénaline qui dicte les pixos. Les gangs utilisent leur art comme un moyen d’échapper aux favelas, pour reconquérir l’espace public en imposant leur identité sur tous les murs de la ville. Le documentaire offre un rare aperçu de cet univers caché, véritable contre-culture symbole de l’effondrement de 20 ans de dictature militaire.

A l’opposé des clichés samba, beach-volley,football, le mouvement a créé son propre son alphabet, inspiré du heavy-metal allemand. Les pixadores sont les seuls à pouvoir déchiffrer ces messages codés : les écritures et les logos compliqués sont incompréhensibles pour le commun des habitants de Sao Paulo et se détachent de considérations esthétiques. C’est la performance, la prise de risque et la violence qui prévalent sur la dimension plastique. La mission : signer de son nom les façades des immeubles à coup de grandes lettres noires triangulaires. Traqués par la police et détestés des autres graffeurs, les pixadores repoussent toujours plus haut leurs limites. Aujourd’hui, leur style unique au monde fait partie intégrante de Sao Paulo. Une richesse qui tient à son indépendance et pas question pour le Pixação de se voir récupéré par les galeries d’art, du moins pour le moment…

En mêlant acrobaties intrépides et cascades sur des trains en mouvement, le film capture l’esprit de rébellion des pixadores, bien au-delà du graffiti. A (re)découvrir d’urgence.

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