Sous le soleil des Solidays – Face B

mardi 2 juillet 2013, par Julie Green.

Du 28 au 30 juin, la quinzième édition du Solidays a réuni plus de 170 000 personnes. Deux de nos rédactrices sont allées y faire un tour, histoire de tâter l’ambiance : les deux ont un ressenti différent. Report en deux faces d’un des plus importants festivals de France. La face A ici.

Vendredi, hippodrome de Longchamp, donc. On passe 15 min à trouver l’entrée « artistes » et on croise une loutre dans une rivière derrière un moulin. Autant vous dire que ça commençait bien.

loutre

Direction les loges. Généralement, « faire un tour dans les loges » se traduit par « commencer à boire et finalement ne voir aucun concert de la journée », mais aujourd’hui nous allons faire mentir l’adage et en voir deux. 16h50, l’attachée de presse m’appelle pour me demander si je n’ai pas oublié l’interview de Crystal Fighters dans dix minutes. J’ai pas oublié, je n’étais carrément pas au courant. J’ouvre une bière et court dans l’espace presse les rejoindre. Heureusement ça n’a pas l’air de trop tracasser les deux membres présents, on enchaine sur une interview n’importe quoi sous le demi-soleil de Solidays.

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C’est bientôt au tour d’Hyphen Hyphen de monter sur scène. Le Dôme est plein à craquer, et les jeunes niçois confirment une fois de plus leur statut de bêtes de scènes. J’entends souvent que leurs prestations sont électrisantes. Je ne sais pas trop ce que ça signifie, en revanche le show est maitrisé, vivant, chamanique.

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Allez savoir pourquoi, après ce concert mes souvenirs sont confus : on a diné du poisson pas très bon au catering avec le groupe, puis été cherché une bouteille de whisky dans un camion, rendu la loge, attendu sans cesse des gens, puis d’autres, avant enfin d’aller voir Saez. Trop de monde, son à peine perceptible. J’embarque mon bien-aimé David pour Raggasonic. Moins de monde, meilleure ambiance. Les mecs assurent, rien à redire, ça ressemble à tous les bons concerts de ragga du monde : on écoute pas trop, on danse, on rigole. Et ouais, ils ont fait « Faut pas me prendre pour un âne », et oui, c’était marrant. Passons pour le vendredi, Clémentine a raison, quand il pleut, c’est pas marrant les festivals.

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Le lendemain, on attend donc tous naturellement la même chose : le soleil. Gagné : il fait beau. Problème : il fait froid. Très froid. Je décide d’aller revoir Orelsan. Pour ceux qui ont déjà vu Orelsan en festival, le milimétrage de son show pose certains problèmes : on le connait par coeur, et c’est agaçant. On en a assez d’entendre qu’il a rencontré sa copine ici avant « Pour le Pire ». Il l’a déjà rencontré à Musilac l’année dernière, à Paris, aux Vieilles Charrues, puis maintenant aux Solidays. J’ai du mal à comprendre l’intention derrière, quand on sait qu’Orelsan tourne depuis 2 ans avec le même set. Ce détail énerve aussi ma voisine de droite. Mais le milimétrage a aussi ses bons cotés : sur les solos de batteries, Aurélien mime chaque coup de baguette avec frénésie. Une telle alchimie avec ses musiciens fait plaisir à voir. Car derrière elle se dessine tout un pan de la musique actuelle : celle de la récente assimilation des genres musicaux, les nouveaux virages du rap, son entrée dans les charts et dans les records de vente. Je crois que c’est à cet instant du festival que je suis devenue philosophe. Ensuite je suis partie me chercher une bière, et contre toute attente je suis retournée voir Orelsan, désormais seule. Mais pourquoi tant de volonté me demanderez-vous ? Pour « Suicide Social », malheureux. Ceux qui le connaissent le savent : l’interprétation en live est magistrale. Il faut y aller au moins une fois pour le voir. Moi ça doit faire 6, le plaisir reste intact.

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J’essaye ensuite de retrouver mes amis, en vain. Plus exactement je les retrouve mais leur état d’ébriété m’empêche de communiquer avec eux. Je retourne dans les loges désemparée. Je croise alors les mecs d’Acid Arab qui jouent à 2h pour le Novaclub et préparent leur set en loges. Eux aussi ont bu. Je me sens seule. Je croise Kery James et prend une photo avec lui. J’embarque le percussionniste d’Acid Arab pour Kery James. Je ne le sais pas encore, mais je vais prendre une claque monumentale. Quelle légende, sérieusement. Quelle interprétation, quelle sincérité, quelle puissance. Pendant 1h, le Dôme va reprendre tous les titres, toutes les paroles, avec une foi inébranlable, poings levés et sourire aux lèvres. Youssoupha débarque pour « Contre Nous » et salue en partant « le meilleur MC français ». Je réalise à cet instant que c’en est assez pour moi. Je veux m’arrêter ici. Je veux que mon dernier souvenir de la journée soit cet instant. C’est ma manière de remercier Kery, de lui dire bravo encore un peu plus fort. Et tant pis pour Sexy Sushi.

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Bon c’est bien tout ça mais arrive enfin le dimanche. Avec lui, le soleil, et croyez moi ou non, la chaleur. Donc maintenant on se plaint de la chaleur.  De nombreux « mais qu’est ce qu’il fait chaud » viennent ponctuer le set des Naive New Beaters, pour notre plus grand bonheur. Les Naive d’ailleurs, on en parle ? Sérieusement les gars… Ok, PARFOIS, vous êtes marrants. Ok, les palmiers c’est cool. Mais qu’est ce que c’est que ce concert ? Qu’est ce que c’est que ce délire hyper embarrassant de prendre ce faux accent américain depuis 5 ans ? Je ne suis pas snob, j’ai été voir Raggasonic, souvenez-vous. Y’a juste un moment où il faut cadrer les choses. Les albums studios sont bien, les morceaux plutôt forts, mais là, il faut vraiment faire quelque chose pour le live : on ne comprend pas les paroles, on reconnait à peine les titres, on dirait un seul et même morceau pendant 1h ! Bon, heureusement qu’il fait chaud. On reste quand même jusqu’à la fin et mangeons des sandwitches devant Biga, conseillé par un ami. N’étant pas une grande connaisseuse, je ne vais pas trop me mouiller : c’était sympa. Oui, j’imagine que ça ne vous aide pas trop, mais que voulez vous, c’était sympa, surtout avec les sandwitches.

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Quelques minutes plus tard, je passe devant Asaf Avidan qui entame « Reckoning Song » et décide de rejoindre l’espace handicapé pour mieux voir. C’est un terrible abus de pouvoir mais la vue est extraordinaire et les gens très gentils, et en plus je suis myope. Voix incroyable, charisme bluffant.

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Vous voyez on voit bien. Bon, ensuite big deal : BEADY EYE. Oui, Beady Eye, le groupe un peu pourri de Liam Gallagher, l’ancien chanteur d’Oasis. Je suis fan. Je vais à tous les concerts. J’écoute tous les albums même s’ils sont nuls. J’ai raté Tryo ET Keny Arkana pour ne pas être en retard. J’étais donc ravie en arrivant 15 min en avance sur la scène Paris de constater qu’elle était vide. C’est une des plus grandes, c’est assez surprenant pour un groupe avec une fanbase aussi énorme. Le concert n’est objectivement pas terrible. Le public se chauffe un peu pour « Rock’n’Roll Star » et « Morning Glory », des reprises d’Oasis, mais le coeur n’y est pas. J’en discuterai un peu plus tard avec Liam qui me dira qu’il continuera à chanter même devant 10 personnes tant qu’il sera dans ce groupe. Assez étonnant quand on connait l’arrogance ordinairement sans limite du mancunien, mais qui laisse espérer, au loin, des espoirs de réconciliation et pourquoi pas, une reformation du groupe dans les années à venir. PRIONS MES AMIS, PRIONS.

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Dernier petit tour dans les loges baignées par le soleil. Par ailleurs, voici une photo, pour ceux qui se demandent où se trouvent les artistes lors des festivals. Elles se ressemblent toutes un peu : un espace isolé, des cabines numérotées, une table de ping pong, des arbres, une deco super chill – lampions, hamacs, tout y passe. Voici pourquoi il est si difficile d’en sortir : il y fait bon vivre mes amis. Les artistes se croisent entre eux, les bières sont au frais dans leur frigo perso, et on peut s’allonger dans des trucs super confortables. La belle vie, quoi.

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Bientôt la fin, il est 21h30 et la foule s’amasse déjà sur la scène Paris pour le dernier set de David Guetta. Ne dites rien, je vous vois venir. Je sais que David Guetta, c’est pas très Surl. Que c’est super mainstream. Que c’est sans surprise. Je sais que ni vous ni la rédaction ne cautionneront ce panégyrique que je m’apprête à dresser. Mais laissez moi vous le dire : David Guetta est Dieu. Je l’ai vu à Bercy l’année dernière, c’était franchement nul. Mais c’était quand même Dieu. Ce mec est le Bernard Tapie de la soupe, la mauvaise foi en moins. Tu peux pas test David Guetta. Plus sérieusement, pourquoi tant d’amour ? Parce que ce mec n’est qu’amour. Il a ce même sourire de gamin fou depuis les premiers reportages d’M6 où on le voit derrière la porte des Bains Douches avec Cathy. Je suis très agacée par tous ces gens qui le traite comme s’il était le diable sans avoir pris la peine d’aller le voir au moins une fois. Un peu de respect les mecs. Les Folies Pigalle, c’est lui. Les débuts de la house en France, il était là. Les Unity au Rex, ça vous dit quelque chose ? L’ouverture du Queen en 92 ? Berlin en 95 vous étiez où ? Parce que lui, il y était. Vous savez pourquoi il s’est tourné vers la prod ? Parce qu’il ne « s’amusait plus ». Il avait 35 ans. Donc ouais, c’est comme ça la vie, en fait. Et vous feriez bien de vous amusez un peu plus, vous aussi. Personne n’emmerde Joey Starr quand il fait des navets au cinéma. N’allez pas emmerder David Guetta parce qu’il fait moins peur.

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Ceci dit, quand on y est, il se passe quoi ? Clairement, ce n’est pas un DJ set. Les gens applaudissent entre les morceaux. Le casque sert à peine à décorer. Mais le mec est là, avec ce sourire, et c’est une sorte d’ambassadeur de la bonne humeur  et de la simplicité. C’est un millionnaire, aussi, me direz vous. Ouais. C’est un peu pour ça qu’il est cool en vrai. En tout cas gens n’ont qu’une envie : lui faire plaisir. Je pense qu’il a cette envie là aussi. Un sourire comme ça, je vous jure, ça s’invente pas. Ca vaut toutes les bonnes prestas de la terre, cette communion avec un public. C’est une vraie logique d’échange. Je pense sincèrement que ce mec là n’est jamais dans le calcul avec son public. Je pense aussi qu’il s’est rendu compte très vite que c’était un bon moyen de le garder, mais ça ne l’empêche pas d’être sincère. Il est là, il discute, il dit « Hey mais attendez c’est immense Solidays en fait !! », dit qu’il n’entend rien quand les gens hurlent et qu’il faut faire la fête comme à Ibiza, et je ne vois personne autour qui sur le moment ne trouve à y redire. Personne. Toujours se souvenir que c’est aussi ça, la musique.

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Merci Solidays, et à l’année prochaine xxx

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