[Critique] Antiviral

mardi 26 février 2013, par Joackim Le Goff.

Article rédigé par Valentin Chapelain

Brandon Cronenberg – Antiviral Cronenberg 2.0

Cette semaine est apparu dans les salles un film aussi oppressant que dérangeant : «Antiviral». Il s’avère que Brandon Cronenberg est bien le fils de son père : sans sombrer dans le plagiat de l’œuvre du patriarche, l’influence du réalisateur de «Vidéodrome», «History Of Violence» ou encore « A Dangerous Method» est bien présente. Le petit Brandon n’était déjà pas loin sur les plateaux de tournage de son génie de père. C’est sur le dérangeant «eXistenZ» que débute sa carrière cinématographique, lorsqu’il participe à l’élaboration des effets spéciaux. Il réalisa également deux courts-métrages, «Broken Tulipes» et «The Camera and Christopher Merk», deux œuvres traitant à la fois d’une claustrophobie engendrée par la société et de l’image que nous renvoi autrui. Alors effectivement, ces thématiques ne sont pas étrangères au début de la carrière de son géniteur, puisque la métamorphose kafkaïenne présente dans «La mouche» est transposée dans le travail du rejeton, cela pour le plus grand plaisir des détraqués du septième art.

Une nouvelle machine arty

Le synopsis est déjà «Cronenberguien» à souhait. Dans une société où la place des célébrités est exacerbée, la volonté des fans de rentrer en communion de manière toujours plus intense avec leurs idoles amène une nouvelle pratique sur le marché. Une clinique spécialisée propose donc des virus ayant affectés des célébrités afin de contracter des maladies similaires. C’est dans ce contexte que Syd March (interprété par Caleb Landry Jones) mène son petit business. Outre son job au sein de la clinique, il vend des échantillons en sous-main aux organisations criminelles. Alors comme visiblement il ne prenait pas assez de risque dans son quotidien comme cela, il va s’injecter le virus que porte la star «Hannah Geist» afin de se rapprocher de celle-ci, et de vivre une souffrance similaire à la sienne. Un germe qui va rapidement s’avérer incurable et surtout mortel. Le décor est en place pour sombrer dans la paranoïa à la Cronenberg et pour amener le spectateur dans une ambiance carrément claustrophobe.

La relève est-elle assurée ?

On se pose souvent des questions sur la qualité des œuvres livrés par des fils ou des filles de… Profiter de son patronyme pour évoluer dans le milieu est effectivement monnaie courante, en abordant ce film, la méfiance était donc de mise. Comme il a été dit, la patte du papa est omniprésente, que ce soit dans le choix de la thématique ou dans l’atmosphère crée par le petit Brandon. Mais une fois que l’on a dépassé les a priori engendrés par sa filiation, on se retrouve devant une œuvre originale et un film réellement réussi. Pour que le propos et la dimension glauque et aseptisés du sujet soient servis convenablement, la mise en scène se devait d’être léchée. Chaque plan est d’une propreté impeccable et les transitions brillent par leur fluidité. Le contraste entre les univers cliniques stériles et l’aspect gore induit par les projections de sang est très réussi, peut-être légèrement trop appuyé par moment. La bande-son est plutôt réussie, sans être marquante. Elle ne restera pas dans les mémoires mais sa capacité à rentrer en résonnance avec l’univers glacial du film est remarquable. Pour ce qui est du sujet, il est abordé avec un recul étonnant, Cronenberg fils nous livre une critique de la société et de l’idolâtrie de la sphère «people» avec un regard rafraichissant. La mise en scène met en profondeur les dégâts collatéraux de cette nouvelle société et le jeu d’acteur de Caleb Landry Jones (que l’on a déjà aperçu brièvement dans «The social Network», «Contrebande» ou encore «X-Men : Le Commencement») nous fait rentrer d’un pas décidé dans la schizophrénie la plus complète.

Antiviral remplit sa mission avec brio. En parvenant à mettre en perspective un pitch aussi novateur et en posant une esthétique aussi réussie, Brandon Cronenberg parvient à assumer sa filiation et nous fait miroiter une nouvelle génération de réalisateurs aux problèmes psychiatriques finalement très plaisant cinématographiquement parlant.

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