Interview // Rockin’ Squat

lundi 21 mai 2012, par Rachid Sguini.

Il est l’un des piliers du rap français, un des fondateurs du groupe mythique Assassin, et accessoirement frère de l’acteur Vincent Cassel. Rockin’ Squat fait partie de cette génération de rappeurs qui ont pavé le chemin à la nouvelle génération. Il côtoie les plus grands noms, comme NTM, AKH, Youssoupha, Oxmo Puccino, Immortal Technique et bien d’autres. Il signe avec son groupe l’un des meilleurs live du rap français, « Touche d’espoir », en feat avec Lyricson en 2009. Il vit aujourd’hui entre le Brésil et la France, où il compose des morceaux toujours aussi dérangeants. C’est donc avec un plaisir immense que nous avons posé nos questions au rappeur le plus engagé du rap français. Entretien.

Salut Rockin’ Squat, ça va ?
Ça va cool, merci.

T’es un peu un ovni dans l’univers du rap français, comment tu l’expliques ?
Car je suis de l’autre côté de la carte, celle qu’on ne veut pas voir, là où la conscience traine avec la patience et la solitude. Tout un programme ! (rires)

Le fait de vivre au Brésil, ça apporte quoi de plus à ton rap ?
Je pense que le voyage est un des meilleurs moyens pour lutter contre les stéréotypes de tout ordre. Mais le voyage n’est pas que physique, la lecture en est aussi un, tout comme le sport. La pratique de l’art en général quel qu’il soit permet de voyager. Donc ce n’est pas qu’une histoire de Brésil, c’est d’être en mouvement avec tous ses sens en alerte qui est le plus important dans ce domaine.

Et du coup, tu te sens toujours aussi connecté aux jeunes français ?                                     
Je me sens connecté au monde, qu’il soit jeune, vieux, humain, animal, végétal, cosmique… Je suis un éternel apprenti donc la moindre rencontre peut être un enseignement dans ma quête d’équilibre.

 

[highlight]Des artistes comme moi avec des textes politiquement incorrects, tu les rencontreras qu’en bougeant ton boule de la léthargie ambiante.[/highlight]

 

« Illuminazi 666 », « Le pouvoir secret », des titres très politiquement incorrects : tu ne penses pas qu’ils te freinent dans ta médiatisation ? Beaucoup de jeunes gagneraient à te connaître.
J’aime les gens qui cherchent pour trouver, un peu comme moi au début des années 80. Ce n’est pas en allumant ma radio que j’entendais du Hip-Hop et qu’on me parlait de cette culture. Il fallait être un Digger, s’intéresser aux choses pour les rencontrer. Aujourd’hui le rap est aussi la nouvelle pop, donc des artistes comme moi avec des textes « politiquement incorrects » tu les rencontreras qu’en bougeant ton boule de la léthargie ambiante.

Après le coup de France Afrique sur Canal+, on t’invite encore à la Tv ou à la radio ?
Très peu, mais même avant  Le Grand Journal  je n’étais pas spécialement très invité non plus. En fait on ne m’invite plus trop depuis l’émission que j’ai faite en 1990 face à Christine Ockrent sur Antenne 2 où la France médiatique a vu que mon groupe n’était pas un groupe comme les autres…

Ça représente quoi la scène pour toi ? Est-ce que show après show, l’excitation reste la même ?
La scène est l’essence même de mon art. Je fais partie de ces rares artistes qui ont fait de la scène avant d’être en studio. J’aime la scène, mais en même temps je ne suis pas le genre de mec à faire de la scène toute l’année et tous les ans. J’aime concentrer mes concerts sur une période bien précise et ensuite passer à autre chose pour y revenir plus tard. C’est comme ça que je ne me lasse pas de tournées et que j’apprécie à chaque fois quand je monte sur scène.

Le public en Amérique Latine est-il plus dur à convaincre, étant non francophone ?
Le public dans le monde entier est réceptif aux bonnes choses. A toi d’être bon dans ce que tu fais.

 Si tu devais être une autre figure de la chanson, tu serais qui ?                                           
Je serais la chanson d’une sirène qu’on entend mais qu’on ne voit pas.

Et si t’étais un humoriste ?
Je serais Charlie Chaplin pour son génie, son talent, son humour, son engagement et son art précurseur. J’aime quand l’humour se mêle à la folie contrôlée.

Si t’étais une figure politique ?
Je serais aujourd’hui le Sous-commandant Marcos car il est un des derniers révolutionnaires en lutte et bien mis de côté par les médias du monde entier. Je serai aussi les peuples qui se soulèvent pour leurs droits, du peuple Palestinien à la tribu des Awa, de la lutte des paysans du MST aux femmes du Kerala…

 

[highlight]Le rap avant c’était de la bombe, aujourd’hui il y a des trucs qui démontent toujours et demain est rempli de surprises, j’en suis sûr[/highlight]

 

« Le rap c’était mieux avant » – on a déjà posé la question à des mecs comme The Alchemist, Rocca, Evidence, Youssoupha… Est-ce que tu penses que c’est juste un débat de sourd, une réalité… Ton avis ?
Chaque génération est nostalgique de sa jeunesse, va poser la question aux Rockeurs, ils te diront que le rock aujourd’hui n’existe plus ! Ce qui est faux. Pareil pour ceux qui ont connu la house de Chicago et Detroit dans les 80’s, etc…Personnellement je ne vis pas dans une époque, je suis partout à la fois, le rap avant c’était de la bombe, aujourd’hui il y a des trucs qui démontent toujours et demain est rempli de surprises, j’en suis sur.

Niveau introspectif, qu’est-ce qui est le plus mauvais dans ton rap ?
C’est que je rap dans le futur, trop d’avance sur mon temps ! (rires)

Un nouvel album avec Assassin un de ces jours ? Tes projets à venir ? 
J’aimerais refaire un album avec mon gars Doctor L, car le vrai travail d’Assassin que le public connaît a été fourni par notre rencontre. Avant entre 1985 et 1990 Assassin était un groupe d’adolescents qui s’amusaient. Le fait que Doctor L et moi-même on se soit trouvé à vraiment fait décoller notre histoire ; nous étions deux bosseurs comme personne ne l’était dans le groupe. C’est ça qui a donné naissance au maxi « Note Mon Nom sur ta liste », aux albums « Le Futur que nous réserve-t-il ? » et « L’Homicide Volontaire ». Sinon pour mes projets personnels, j’attaque une tournée à partir de fin mai 2012 jusqu’à début décembre, on va faire plus ou moins 30 concerts pour finir par le Casino de Paris le 2 décembre 2012. Et je bosse aussi sur deux nouveaux albums qui sortiront je l’espère courant 2013.

Un son à nous conseiller pour une de nos futures playlists ?
Un seul ? Rubinho e Mauro Assumpção, « Os Olhos » de la Soul brésilienne des années 70.

Si ta musique était un plat, quels en seraient les ingrédients ?
La formule secrète ne peut-être dévoilée, c’est comme la formule de Coca, presque personne la connaît, sauf qu’à la différence d’eux, on n’a pas signé avec le diable nous !

Merci d’avoir pris le temps de répondre à nos questions.

Un petit lien Deezer pour l’écouter.

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