Photos : Philadelphie, le vrai berceau du graffiti

jeudi 9 mars 2017, par Marine Cagniet.

À mi-chemin entre New York et Washington DC, Philadelphie souffre aujourd’hui de l’ombre de ses voisines. Véritable bible historique de la constitution des Etats-Unis, Philadelphie, la capitale des Amish, n’a pourtant rien a envier à la grosse pomme en matière de graffiti. Petit retour en arrière, et focus.

Philadelphie, 1967. Un certain « Cornbread » envahit les façades de sa ville natale à coup de spray-can et attire rapidement la presse locale, qui s’interroge sur l’identité de ce vandale. Un nouveau phénomène né et gagnera bientôt les rues de New-York, on appellera cela le graffiti. Le père du graffiti poussera sa pratique bien plus loin, en taggant son nom sur un éléphant du Zoo de la ville, et ira même jusqu’à vandaliser le jet privé des Jackson 5. La légende est en marche. Cornbread sera rapidement suivi par Cool Earl à Philadelphie, avant que le mouvement explose complètement à New York.

Bien qu’aujourd’hui, Philadelphie affiche fièrement son statut de « ville où est né le graffiti », il en fut autrement dans les années 1980, où la ville n’était alors pas capable de gérer la prolifération de cette nouvelle expression. En 1984, le maire de l’époque Wilson Goode, se lance dans une véritable campagne de sensibilisation des jeunes graffeurs, le but : réunir la communauté vandale et impliqués les jeunes délinquants dans le nettoyage de la ville. Pour lancer ce programme, Goode fait appel à Jane Golden, artiste muraliste, et dont le diplôme de l’université de Stanford rassure les politiciens. Elle crée alors le Mural Arts Philadelphia (MAP) qui, financé de moitié par la ville, va complètement modifier le paysage urbain des quartiers de Philly.

Le MAP, dont le crédo est « l’art provoque le changement », va oeuvrer à souder la communauté issue des quartiers noirs et ouvriers, connus pour leurs émeutes. La dynamisation des quartiers va inclure les jeunes populations et surtout leur rendre hommage. Ils participeront à l’élaboration ou la restauration des murales, comme ce fut le cas avec We the youth, réalisé en 1987 par Keith Haring, qui fut restauré en 2013 à l’initiative du programme. 30 ans après sa naissance le MAP compte plus de 3500 murales à son actif, qui ont toutes pour but de valoriser les minorités et d’inspirer la jeunesse sensible, avec des messages d’appel à l’unité, la tolérance et le respect. Beaucoup d’entre elles sont aussi, des hommages aux acteurs de la scène locale, comme la murale de Michelle Angela Ortiz, qui représente Gloria Casarez figure incontournable de la politique LGBT à Philadelphie, où encore ASpire: No limits d’Ernel Martinez, qui rend hommage à Shawn L White, qui a joué un rôle considérable auprès de la sensibilisation au dépistage et à la prévention du VIH chez les jeunes noirs américains.

Si le programme MAP à principalement commencé dans les quartiers défavorisés comme Kensington ou Fishtown, il s’étend aujourd’hui à toute la ville, et tous les ans de nouveaux projets gagnent de nouveaux quartiers comme le projet Spring Arts District à Callowhill, qui se veut une « galerie temporaire » où plusieurs artistes non-muralistes, disposent d’espace public pour une durée limitée. Outre les artistes locaux, le programme s’est offert les services des grands noms du Street Art actuel. Ainsi Vhils, Shepard Fairey, ou encore le français JR, se sont vu jouer les mentors auprès des jeunes Pennsylvaniens. Si le MAP a le monopole des murales à Philly, certains quartiers font de la résistance, et il nous arrive de croiser encore quelques lettrages ou collages illégaux, notamment du coté des quartiers nord de la ville. De quoi oublier ton prochain voyage à New York pour un petit moment.

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