Bonjour Marion Maréchal-Le Pen, vous n’avez pas honte ?

mercredi 24 juin 2015, par Jean-Pierre Elkalash.

Quand il ne s’entraîne pas au tir au pigeon dans nos locaux, Jean-Pierre Elkalash nous livre des éditos sanglants qui font rarement dans la dentelle. Les rafales de son calibre n’engagent que lui. Comme Chuck Norris, il sait où il met les pieds, et c’est souvent dans la gueule. Que le monde se tienne à carreau.

L’être humain n’en finit pas de me fasciner… et c’est tant mieux. Il n’aura fallu qu’un mois passé à Ibiza, contraint à un exil forcé par la rédaction de SURL suite aux menaces de l’amicale laïque des fans de Big Flo & Oli, pour que l’actualité me tire de ma douce torpeur. Il arrive parfois, à l’heure de saisir ma sulfateuse pour pondre mes éditos, que je sente perler sur mon front l’angoisse de ne pas avoir sous ma gâchette un beau gibier où loger cette rafale de pruneaux qui me vaut désormais une solide réputation de connard – et quelques procès en attente. Fort heureusement, c’est toujours in extremis qu’un(e) volontaire se sacrifie, sans que personne ne l’ait sollicité(e), et nous démoule une bullshit sans précédent dans l’histoire de la connerie.

Cette semaine, c’est donc toi qui t’y colle, Marion. En déclarant que tu étais fan de rap français, tu ne peux pas savoir combien tu as chamboulé ton petit monde. Avouons que ce grand écart rhétorique digne d’une végétarienne s’habillant en manteau de fourrure fait chaud au cœur. Ouais, franchement, ça fait zizir Marion. Je te vois déjà, répondant aux sms rageurs de ton papy Jean Marie par un laconique « si si la famille », ou publiant le dernier clip de Médine sur ton skyblog. Mot dièse doublediscours, wesh.

Ceci-dit, te savoir sensible aux punchlines de Youssoupha et aux bêlements de Maitre Gims m’intrigue. Les mauvaises langues soupçonnent une technique grossière pondue par les génies marketing du FN, voulant apporter une touche de jeunisme au Front National. Un parti 2.0 über-cool XPTDR acceptant en son sein militants gays et groupies de rappeurs. D’autres comme moi, sensibles aux errances de l’âme humaine, voient en ta déclaration d’amour au rap un signe inquiétant de déséquilibre mental. Et j’imagine les raisons de ce trouble. Je te vois en adolescente rebelle sillonant les rues d’Hénin-Beaumont, ton petit coin de paradis, en sweat Unküt trop grand, un autocollant de Sniper flanqué sur ton Typhoon. Que n’as tu pas réglé cette crise existentielle et ce désir de transgression propres à l’âge ingrat, pour aller t’encanailler dans les ruelles sombres du rap français, fantasmant sans doute un souffle d’exotisme. Et ce fameux Maitre Gims… Peut-être que le soir venu, dans ta chambre, saisie d’un émoi coupable, tu te plais à imaginer que son hit « Bella » fut écrit pour toi. « Elle répondait au nom de ‘Bella’ / Les gens du coin ne voulaient pas la cher-lâ / Elle faisait trembler tous les villages / Les gens me disaient : ‘Méfie-toi d’cette fille-là’. » On comprend qu’une psyché torturée puisse trouver en ce refrain, fut-il écrit par l’ennemi, une occasion rêvée de s’identifier.

Tu déclares aussi apprécier Youssoupha mais ne pas être d’accord avec tout ce qu’il écrit. Lorsque le lyriciste bantou kicke « cette chanson c’est comme la France, tu l’aimes ou tu la quittes », tu y vois sans doute le signe d’une provocation frondeuse. Je te l’accorde Marion, moi qui les fréquente un peu, les arabes et les noirs ont le désespoir un peu voyant.

À force de souffler sur les cendres de l’identité nationale, on peut comprendre que tu finisses mal braisée, mais si tu déclares ta flamme au rap dans le but de racler quelques voix, laisse moi jouer le rôle du Canadair, ma chérie.

Ne soyons pas dupes, si les mouches ont changé d’âne, l’odeur du fumier reste la même. Alors, quelle attitude adopter devant ce syndrome de Stockholm déstabilisant ? Je me dis qu’au fond, le pardon est la meilleure réponse. Un pardon judéo chrétien en somme. Le FN cherche notre absolution, mes frères et sœurs. Joignons nous les mains, tendons l’autre joue, acceptons ces brebis galeuses dans nos rangs comme on accepte les blagues racistes d’un membre de notre famille un soir de Noël et prions. Prions pour que ça ne donne pas des idées à l’ensemble de la classe politique. Je n’aurai jamais assez de cartouches.

Sur ce, je vous laisse, j’ai un Sudoku à finir sur la plage.

Bisous identitaires et headshots.

 

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