Les dix sons à retenir de ce lundi fou

mercredi 17 décembre 2014, par Antoine Laurent.

On commence à avoir l’habitude : les kainris font toujours les choses en grand. Il y a dix jours, le rap français se passait le mot, cassait la grisaille des lundis et lâchait au même moment une brochette de morceaux de bon – et de moins bon – goût. Booba sortait « Caracas » et « Vrai » (avec 40000 Gang), Kaaris répondait avec « 80 Zetrei », Lino balançait officiellement « Suicide Commercial » et Joke, Dosseh et Gradur faisaient équipe sur « Le coup du patron ». Un lundi 8 décembre aux couleurs du rap hexagonal.

Jaloux, nos amis d’outre-Atlantique tapent du poing sur la table une semaine plus tard et rappellent à tous qu’il ne faut pas trop les chercher. Ce lundi 15 décembre, ce n’est pas un mesclun de morceaux qu’ils présentent mais un buffet d’albums et de mixtapes d’une qualité rare. Le genre de formule à volonté que tu ne trouves que dans d’obscurs restos chinois et dont ton estomac ne sort jamais indemne. Entre le Pink Print de Nicki Minaj, le Blame It on the Streets de YG, le Luca Brasi 2 de Kevin Gates, le Black Ship Don’t Grin de Starlito ou le Ransom de Mike Will Made It, on ne sait plus où donner de la tête. Oh, et D’Angelo décide aussi de faire son retour, après 14 ans d’absence, et sort sans prévenir un nouvel album, Black Messiah. De quoi (presque) éclipser le leak de « Nobody » de Chief Keef et Kanye West, c’est dire.

Pour éviter l’indigestion, on a pris 48 heures pour déguster le tout. Juste le temps de sélectionner les dix sons à retenir de ce lundi fou.

YG – Blame It on the Streets (ft. Jay 305)

Si, comme nous, vous avez été tout retournés par My Krazy Life, alors vous devez surement trembler à chaque nouvelle sortie de YG. L’homme qui incarne la vida loca de la cité des anges déçoit rarement : peu de nouveautés sur le projet éponyme au morceau que l’on vous a sélectionné (cinq tracks inédits, un live, un acoustique, un remix et un freestyle), mais ça bounce toujours autant. Don’t sleep on it.

Nicki Minaj – Want Some More

Fini le style putassier pour l’artiste de Young Money. The Pinkprint est un voyage au cœur de « la vraie » Nicki Minaj : fragile, beyoncesque mais aussi fidèle à ses origines rap. Si tout le LP ne se vaut pas – parfois bien trop orienté teen –, on retrouve des titres qui nous rappellent que Nicki est la meilleure rappeuse de son temps. Fidèle à son instinct, Barbie rassemble Metro Boomin et Zaytoven à la prod pour un titre envoûtant, pile dans l’ère du temps.

Nicki Minaj – Big Daddy (ft. Meek Mill)

Violence. Dans ce morceau, c’est un Meek Mill en feu qui donne le ton à Nicki Minaj sur un beat brutal et terriblement efficace. Flow d’excitée, puissant refrain, c’est la rappeuse Nicki qu’on apprécie et qui met tout le monde d’accord. Mais que fait ce banger dans les bonus ?

Mike Will Made It – Drinks On Us (ft. Swae Lee & Future)

Qu’il est dur d’extraire les perles du dernier projet de Mike Will Made It. On pèse nos mots : les 20 titres de Ransom sont tous très bons. L’album s’écoute d’une traite et il est rare de skipper un track. Oh, et si vous ne l’aviez pas encore réalisé, les deux gosses de Rae Sremmurd – représentés ici par Swae Lee, moitié du groupe – sont (très) bons. Tous leurs titres, ou presque, sont efficaces : c’est encore le cas avec Drinks On Us où le dreadeu de 19 ans tient tête à Future sans aucun complexe. #noflexzone

Mike Will Made It – Stop-Start (ft. Gucci Mane, Chief Keef & Peewee Longway)

La seule lecture du titre du morceau et, surtout, des noms qui l’accompagnent fait pâlir. T’as peur d’être déçu, de te trouver une fois de plus avec un titre où les rappeurs les plus enfumés du game ne donnent qu’un quart d’eux-mêmes. Mais ce serait omettre le fait que Mike Will est un formidable architecte sonore : Gucci excelle sur le refrain, la prod est léchée et l’ensemble du morceau déboîte. À écouter en voiture, la nuit.

Mike Will Made It – Swerve (ft. ILoveMakonnen)

Quand il ne se fait pas gifler sur scène, ILoveMakonnen est capable de sortir d’incroyables morceaux. Tu te demandes presque si c’est toujours du rap, au final. Juste avant de te rappeler que tu t’en contrefous. Le hochement de tête est plus vrai que jamais : « I got niggas in the trap like a mouse. »

D’Angelo – The Door

14 ans d’attente. 100 000 ventes attendues la première semaine, soit à peine 50 000 de moins que… Nicki Minaj. Une vraie perf pour D’Angelo qui a surpris son monde en sortant à l’improviste Black Messiah, une grosse décennie après son dernier album, Voodoo (2000)L’attente valait le coup ? Les vrais fans et les projections de ventes semblent le penser. Les autres se rappellent que musicalement, ça rassemble beaucoup, beaucoup à ce qu’a fait Raphael Saadiq toute sa carrière.

Kevin Gates – Sit Down

Assieds-toi et écoute. À travers une prod répétitive et des lyrics personnels, le rappeur signé sur Atlantic Records – dont nous vantions les qualités en mars 2013 –  se livre sur ce morceau issu de sa dernière mixtape, Luca Brasi 2, déjà téléchargée plus de 100 000 fois sur Datpiff. De son douloureux passage en prison à sa sensibilité de thug quand il entend Take Care de Riri, Kevin Gates signe ici un titre très authentique qui exacerbe notre intime fragilité.

Kevin Gates – Out The Mud

Le morceau est sorti sur la toile il y a plusieurs mois, il est donc probable que pas mal d’entre vous le connaissent déjà par cœur. Mais « Out The Mud » reste le titre phare de l’excellent Luca Brasi 2 : un hymne à la bicrave comme on les aime, entaché de cette trap de Louisiane qui fait la force de cet autre Keen V.

Chief Keef – Nobody (ft. Kanye West)

Dans une atmosphère vocalement doppée par Kanye West himself, c’est deux générations de rappeurs de Chicago qui collaborent pour un titre bien loin des bases de Chief keef. Si on peut regretter l’absence de vrai couplet de Mr West, on reconnaît le sample de Willie Hutch précédemment utilisé à la perfection dans « Lost » de Chance The Rapper, autre rappeur de… Chicago. Ça sent quand même pas mal la carotte.

Sélection conçue conjointement avec Sylvain Caillé

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