Interview – Jean Nipon

jeudi 31 janvier 2013, par Julie Green.

Jean Nipon. Ce nom de vous dit peut-être pas grand chose, pourtant cet homme sans âge ni prénom est un des DJs français les plus respectés par ses pairs. Passé par toutes les formations les plus cools de ces dix dernières années, de Teamtendo à Institubes en passant par le Régine et la team Katapult, Jean Nipon est toujours là où il faut, quand il faut, sans jamais en avoir l’air. Rencontre passionnante dans un rade du 10ème avec le plus japonais des DJs français.

Tu as eu mille vies. Batteur à Bordeaux d’abord…
Ouais. J’ai commencé par la batterie dans des groupes de hardcore.

DJ Aï ?
Dj Aï ouais.

…remixeur, graphiste, tu changes de nom et deviens Jean Nipon.
Ouais, Jean Nipon vers 2002, 2003.

DA de chez Régine,
Exact.

..Là tu t’essayes discrètement mais brillamment à la vidéo, puis à nouveau batteur…
Non en fait j’ai juste fait ça pour me rappeler comment c’était avant, et Grand Dieu merci d’avoir choisi la vie de DJ. C’est moins lourd à porter, t’es mieux payé, tu manges moins de sandwiches fromage sur la route. C’est toujours le plus cool, le plus débile aussi. J’ai fait ça un mois avec Jeremy Jay, l’américain sur K Records, pop un peu dandy, David Bowie et tout. Donc ouais c’était marrant de repartir sur la route comme ça, mais c’est trop dur. T’arrives, faut que tu poses ta batterie, installer la batterie, soundcheck : hyper chiant (il mime les sons). Il est 18h , il faut manger, il faut attendre : « vous mangez ? » – « bah ouais on mange », restaurant pété, t’arrives, y’a un groupe qui joue avant toi : chiant, public : pas beaucoup de monde. Après tu joues, ampoules aux doigts, bon petit rappel, ok, on s’est planté sur 2-3 morceaux, c’est pas grave, on parle, on re-démonte, dans la minute. Il faut mettre dans le camion, les amplis de 15 kilos… Donc voilà, bon souvenir, mais…come on man.

Dans laquelle de ces fonctions as tu les meilleurs souvenirs ?
Je pense DJ en fait. Tout le temps. J’ai été dans différents crews et voilà, ce qui est toujours fascinant et hyper excitant, et énergétique, c’est quand tu te retrouves au milieu de 5/10 personnes, tous unis pour obtenir un truc. Tu fais une soirée, un festival avec tout le crew que tu représentes, c’est très travail d’équipe. Comme d’ailleurs j’ai des supers souvenirs de travail d’équipe quand je bossais dans la pub avec certaines personnes. En fait mes meilleurs souvenirs sont tous liés à un truc de groupe. Une direction, on y va tous, et comme on sait que c’est tellement dur d’unifier les gens, à tous les niveaux…

Pas si dur que ça quand tu y prends du plaisir. Mais bon, pas si simple non plus. A un moment, t’as envie de repenser à toi. Sauf que si t’es là, c’est grâce aux autres.
Pas si dur que ça non. Après il faut gérer. C’est pour ça que l’âge venant, je me dis voilà, je suis moins jeune chien loup avec les dents qui rayent. Je kiffe.

T’es content là ?
Non, on est jamais content.

[highlight]Quand on crée un morceau, notre ego c’est : « je veux un morceau qui reste. »[/highlight]

On a pas vraiment l’impression que tu aies un plan de carrière. Tes sorties sont toujours un peu isolées, et ce que tu proposes, toujours différent. C’est quoi ton rapport avec la musique ?
En fait je suis tellement boulimique de musique depuis très très très longtemps, que à mon niveau je sais exactement ce que je trouve génial et inaccessible. Que ce soit du Arthur Russel ou un vieux morceaux caché de LFO. Donc quand t’es fan et qu’en plus tu mixes, tu passes ton temps à chasser le meilleur morceau. En plus là maintenant, y’a tellement de sorties tout le temps. Quand on crée un morceau, notre ego c’est : « je veux un morceau qui reste. » Le truc intemporel, LE morceau. Tu te dis que ce que t’écoutes c’est tellement bien…tu vois que ce que tu produis, tu te rends compte que c’est bien, mais en dessous. Tu te dis « oh no », tu te brides, t’as peur, tu laisses tomber. Moins bien fait, moins bien produit, moins de basses, et voilà. Donc quand t’arrives à ce moment là…c’est hyper délicat. Soit t’as 20 ans, les couilles grosses comme ça et tu te dis « va te faire enculer », et assez souvent t’arrives à faire un truc super frais que personne n’a fait, parce que t’es arrogant. Mais à mon age, la trentaine, soit tu fais « ok, je suis un suiveur », soit tu te lâches. Et tu t’en fous de ton propre regard d’après. Tu y vas. J’ai fait ce que j’avais envie d’entendre, envie de jouer. Et donc là je me lâche, et étrangement ça m’ouvre de nouveaux patchwork de sons, d’alliages, je fais les breaks que je veux, j’ai pas besoin de respecter les codes technos. depuis 2-3 ans, il y a des mecs comme Canblaster, qui mélangent le r’n’b, la techno, etc… Tout est ultra hybride, avec des micro-scènes, des micro-niches. Et là je m’éclate à fond. Grosse basses on s’en bat les couilles. LACHAGE.



Et aussi, un truc que je voulais dire. Donc : tellement fan de techniques de productions, que ce soit un girl group de 1964 ou un truc électronique de Sheffield de 95, là je suis vraiment rentré dans une phase de réflexion sur « Qu’est-ce que produire ? ». Dans le sens, qu’est ce que ça implique. Au delà du morceau, au delà d’une mélodie, au delà d’une bass line. Avant j’étais pas comme ça. Par exemple, hyper concret : je viens de créer une caisse claire pour le beat. Est-ce que je pourrais écouter cette caisse claire seule pendant 4 minutes ? Sans rien d’autre. Est ce que cette caisse claire peut me fasciner suffisamment pour que je l’écoute sans rien pendant 4 minutes ?

Les possibilités sont infinies à partir de là…
Non parce qu’après, tu sais ce qui t’intéresses, et tu te fabriques des raccourcis. Si la caisse claire seule ça roule, si son évolution est assez subtile, et si chaque segment, chaque couche est intéressante en elle-même, t’as 80% de chance que ton morceau soit une grosse tuerie. Et ça fonctionne. Sound-design, mais pas pour un truc artificiel. Dans la profondeur. C’est marrant que je me sois jamais posé ces questions là avant sur ma prod. En gros, là ce que j’ai trouvé, c’est que la forme égale le fond. La forme, c’est le fond.

Je suppose que t’as du pas mal voyagé pour tes DJ Sets depuis le temps que tu exerces. Une ville qui t’a marquée davantage que d’autres la nuit ?
Quelques excursions nocturnes new-yorkaises étaient vraiment aussi clichées que ce qu’on peut imaginer avec le cinéma. T’es dans un bar, ils vendent de la drogue, il faut pas parler trop fort sinon le mec te vire ,et tu te retrouves après dans un espèce de bordel avec des stripteaseuses… J’ai vraiment vu des nuits folles à New York, mais pas forcément axées sur la musique. Un truc style vraiment Scorcese. Tokyo, pareil. J’ai étudié en tant que student artist dans le sud du Japon, à Fukuoka, la capitale de Kyūshū, l’île du sud. Tokyo, y’a des endroits tellement de ouf. Des bars tellement incroyables, précieux, d’orfèvre …

C’est pas vraiment l’image qu’on en a ici pourtant.
Ah, si si. Ça c’est l’image un peu pétée, les gens qui vont à Tokyo « Oh, Shibuya ! Barbie Doll ! ». Non. Là bas, il faut bien dire un truc, les gens fument partout, tout le temps. C’est génial. Et les mecs boivent tout le temps. Et ils tiennent pas l’alcool, donc ils sont pétés hyper vite, mais t’as jamais un truc de colère, d’animosité, t’as aucune tension, du coup, t’as des nuits folles. Et même des trucs pétés de karaoké, c’est ultra bien. Parce qu’ils savent mettre les formes. Nuit à Tokyo : magique. Hyper emo, hyper mignon, et à la fois, hyper drogue, hyper alcool…les mecs sont Bukoswski en fait dans l’âme quoi, vraiment ! Ils sont vraiment fans de ça. Regarde la littérature japonaise, les films japonais même. Il y a toujours ce coté happy/sad. Ils appellent ça comme ça. Ce sentiment de mélancolie, ils sont toujours un peu dans le regret… Tu vois les films japonais ? (il mime un acteur, regard vers la table), style je bouge pas trop mais dedans ça brûle. Et c’est génial. Ils sont hyper frustrés aussi. C’est une société de performance ou les mecs se lâchent à coté. Le coté un peu dark c’est qu’il y a beaucoup de mecs en mode suicide : pression de ouf, la honte si tu perds ton travail, la famille c’est hyper dur, les enfants… Du coup quand ils se lâchent, c’est le bonheur.

[highlight] »La basse, c’est ce qui termine ton expérience physique, organique, au sein du club. »[/highlight]

Tu es aussi un fervent défenseur des décibels en clubs. Pourquoi ça ?
Pas forcément du volume sonore. Tu peux avoir un volume raisonnable et de qualité, mais ce qui est important à mes yeux pour la musique électronique, mais même la techno tout court : IL FAUT DES BASSES. Il faut des basses, et il faut des SUB. La musique c’est 50% de SUBs ou de basse fréquence. C’est ce qui termine ton expérience physique, organique, au sein du club. C’est ce qui fait que la musique n’est pas la même que dans ton Ipod ou avec les haut-parleurs de ton ordinateur. Non. C’est une vraie expérience physique. Quand tu prends le Space Mountain à Eurodisney, excuse moi mais si t’essayes de faire ça à la campagne avec une petite rampe pétée et quinze mecs qui tirent, t’auras une petite poussée, mais c’est pas la bonne expérience. Space Mountain, ton ventre il remonte jusqu’à la gorge. Voilà. C’est exactement le même rapport entre la musique un peu médium aigu d’appartement et la musique de club où les basses finalisent l’expérience musicale. Je suis même pas en train de parler de différence de qualité audio, de mp3, WAV, non non. Juste l’expérience physique. Tu sais avant, les fans de Rephlex (le label d’Aphex Twin), disaient « Fuck dance, let’s heart, brain dance », ordinateur, musique un peu cérébrale. Ok cool. C’est aussi une grosse partie de la musique électronique. Mais si on peut parler de performance live comme le fait le japonais Ryoji Ikeda, il fait un truc type vidéo projection, Ableton bizarre, mais avec des fréquences vraiment incroyables. C’est un truc mental, hyper cérébral, il cale vraiment ses bips et ses trucs avec des diodes comme ça, projetées, et t’as des basses fréquences, un espèce de vent de son… Ca c’est la musique électronique telle qu’elle doit être vécue. Les kids de maintenant sont tellement habitués à un son medium que limite, j’ai vu ça, des mecs se plaindre aux ingés sons, ils demandent de baisser les basses !

[highlight] »Les clubs maintenant, c’est très très souvent du Mac Do. Tu manges, ça a le goût d’un truc bon, mais une demi-heure après tu as encore faim, t’es gras, et tu vas mourir du cœur. »[/highlight]

C’est dingue d’avoir franchi ce palier…
Ouais mais comment tu veux qu’ils le sachent ?! Même si je suis pas super fan, j’ai un souvenir, avant la loi des 105 dbs . Je raconte souvent ça mais c’est vraiment hyper probant. C’était vers 1996/97, je viens voir un vieux jamaïcain, vraiment barbe blanche toute pétée, tout ganja la gueule horrible, et c’est un vrai selector le mec. Je sais même plus comment il s’appelle. Il a pas deux platines, il en a qu’une, avec uniquement des 45T pressés à la maison pétés, et il les mixe un par un. Hop il arrête, hop il remet. Et tellement, tellement fort. Tellement les SUB que tu comprends qu’il mixe un par un, parce que quand il arrête…t’as l’impression que tout s’arrête. Organique. Animal. Et ça n’existe plus. Y’a quelques clubs…Par exemple, l’autre jour, hyper important. Je matais une interview de Claude Von Stroke. Il disait, « avant j’étais à fond techniques de production, stereo, gauche-droite, mettre un petit effet, et je me suis rendu compte que la quasi-totalité des clubs dans lesquels je joue n’ont quasiment pas de stereo. » Parfois même les systèmes de gros clubs sont branchés en mono. Donc t’as juste un son droit, et ça sert à rien de mettre un truc à gauche ou à droite ! Un peu comme les mecs qui se plaignent de plus avoir de bonnes platines vinyls Technics en état. Les clubs s’en foutent, les cellules sont pétées, les mecs sont tous sur l’ordinateur. Je dis pas que c’était mieux avant. Mais maintenant, c’est très très souvent du Mac Do. Tu manges, ça a le goût d’un truc bon, mais une demi-heure après tu as encore faim, t’es gras. Et tu vas mourir du cœur.

De toute façon, maintenant à Paris, n’importe quel club est entouré d’habitations tu peux rien faire. Alors que Berlin, c’est des friches, bâtiments industriels…Paris, t’es mal. Et en plus la loi des 105 DB. Et un jour après un soundcheck je demande à Kadou -l’ingé son du Social club, de me montrer les vraies capacités du sound system. Et là…le vrai son. Hyper clair, hyper fat. Larmes. Direct. Donc dur mais, on est bridés, parfois y’a presque du bon son, durant les Concrete par exemple… mais voilà : pas de voisins, petit lieu, bas de plafond, matière mate, donc pas de reverb…Boom, in your face.

On connaît tous un peu ta passion, ton lien avec le Japon, mais je voulais te parler d’autre chose. En 2008, tu sortais « Eurogirls go To Baltimore » avec Orgasmic. Parles nous un peu de Baltimore.
Parce que Baltimore… il faut remonter à un an avant ça. Toujours avec Orgasmic, sur le label d’Emile -qui maintenant bosse pour Sound Pellegrino, mais avant ça il avait fondé Arcade Mode, un web de distribution et un petit label. On avait fait un truc sur le Baile Funk brésilien, musique de ghettos des favelas hyper post-Kraftwerk, freestyle music, hyper ghetto, hyper rough, et on était à fond là dedans. Et comme on était fans de Dance Mania et de tous ces labels de ghetto-house de Chicago, apparus dans le milieu des années 90, avec des mecs MCs qui disent « fuck you, fuck in the ass bitch », super primaire. La Baltimore Music, la B.More, c’est une sorte de style bâtard, issu de la house, un peu Detroit, un peu Chicago avec un rythme hyper spécifique (il le chante) : un sample de batterie hyper gimmick que chaque morceau utilise. C’était un style hybride, bâtard, hyper ghetto, prolétaire, encore une fois noir, alors toujours le coté « fuck you up », mais super funky. Avec cette compil, on demandait à des producteurs hyper respectés de cette scène là, Rod Lee, Technics et d’autres de nous filer des morceaux. En parallèle on a demandé à des français et des européens de donner leur interprétation de Baltimore. On a eu Feadz, les Round Table Knights qui avaient fait une version de Gala. Et ouais, au final super projet, hyper contents.

Tu peux nous parler de tes tatouages, de ce qu’ils représentent ?
Chaque tatouage correspond à un moment de ma vie, à un projet, et ça ne regarde que moi. J’ai dessiné tous les motifs. Sauf la croix à l’envers, mais bon. Ca c’était mon premier. C’était vraiment pour dire non à toutes les religions. Toutes, toutes. Me cassez pas les couilles avec des trucs de poésies; la Bible, le Coran, c’est de la poésie pour moi. C’est le patrimoine de l’humanité. On s’est construits là dessus. Merci quand même la Bible durant les ères un peu chaotiques de l’histoire de l’humanité, parce que sans ce garde-fou on aurait pas été cimenté. Mais là c’est fini, c’est l’ère industrielle, les livres sont imprimés, c’est pas des moines pétés qui vont retranscrire un livre unique, on peut retrouver les philosophes grecs, qui eux aussi étaient croyants, mais come on… Rationnel : la philosophie, le sport. Je prends ça chez les grecs. La religion ? Non. La religion ? c’est la musique, c’est le cinéma. Pas plus. Si tu commences à vouloir convertir, et donc à vouloir verser une seule goutte de sang à cause de ça, c’est mort, et ça gangrène tout. C’était un peu aussi mon bagage hardcore, groupe politique.

A ce sujet, dans une interview pour Brain qui te demandait si c’était pas angoissant de vieillir tout en ayant un public toujours (plus) jeune, tu répondais qu’il fallait que tout le monde voit Phantom of the Paradise. Tu peux nous expliquer ?
Parce que Phantom of the Paradise, c’est un film tellement taré, et je vais pas dire c’est trans-générationnel…mais c’est un truc…C’est l’histoire d’un mec qui fait le pacte avec le démon, pour être jeune à vie et avoir le succès à vie. C’est assez marrant que ce thème là se retrouve dans le film. Mais c’est tellement incroyable, que peu importe l’âge que t’as, t’auras les yeux qui brillent de voir une telle inventivité, de voir ce truc qui à la fois hyper ridicule et hyper émotionnel, et tu pleures pour l’héroïne, tu pleures pour son compositeur dont on a volé la musique… C’est une sorte de mythe faustien éternel, et si tu le vois jeune, ça te marque à vie. Ca fait parti de ces films…pas qui te font devenir adulte, mais qui te font encore plus réfléchir sur ce qu’il se passe autour de toi. Mais maintenant, à cette interview de Brain, je rajouterai : surtout les gars, lisez quoi. Parce que là les kids ils lisent que des blogs, des chats…come on. Alors c’est un peu chiant de lire c’est clair…

…Ouais enfin tu lis 20 pages et c’est parti.
Ouais mais non pour eux c’est relou. Ca veut dire quoi ? Pas de bruit, sans parler, sans musique, sans image, juste le bruit des pages qui se tournent et pendant 300 pages ?! Yes sir. Ou prenez de la drogue, et violez des gens.

Je ne sais pas si tu t’en rends compte, mais tu as un sens inné de la formule. Je me souviens de ta mini critique de Drive « Ce film est génial par défaut car il prend un peu ce qui manque actuellement à Lynch, Friedkin, un peu même Dupieux et surtout il reste fidèle aux films tout crades seventies que Winding adore ( ex : Thriller, A Cruel Picture etc ) si des plans lents sont synonymes de « modeux » vous êtes en erreur, la même mécanique de contemplation était à l’oeuvre dans son viking movie, on déplace juste les hommes ailleurs, ils sont toujours aussi perdus, violents et en quête de choses qu’ils ne connaissent pas, en fait ce film ultra resserré et moins perdu dans un verbiage mental que Valhalla Rising pourrait presque me rappeler les premières vidéos de Cremaster ( du lourdaud Barney) seulement la narration est bien solide, la présence manichéenne du bien/mal est ultra jouissive enfin même si Winding maîtrise son film de A à Z il n’y a jamais d’épate et de prétention, c’est une série B classique et il le sait, il vient juste de rentrer dans hollywood sans vaseline, en catimini – champion Midas ! ». Fallait le balancer quand même. J’en ai plein d’autres en tête. Pourquoi t’écris pas ?
Ah ouais. Ouais, ouais, ouais c’est vrai c’est pas mal. Ah non mais moi j’adorerais écrire, sur la musique, sur le cinéma. Mais être payé. Pas beaucoup hein, mais symboliquement. Récompense quoi.

Personne t’a jamais proposé ?
Non. Je sais pas, je suis peut-être pas dans les bons cercles…

Marrant quand même. C’est un peu comme Guido (ndlr : Guido, entre autres DA du club Chez Moune, créateur du fanzine Antijour…) qui écrit super bien.
Ouais Guido écrit super bien. Etienne Menu écrit super bien. Mais ils sont pleins aux rédacs. Ils prennent des gars d’écoles de journalisme, un peu pétés, qui ont une culture middle of the road, ils savent qu’ils doivent connaître certains trucs. Après, je pense pas que les rédacs cherchent un point de vue. Au pire, ils cherchent une sorte de Zemmour, un Christophe Conte,  » acide « , avec un semblant de point de vue, mais quand les mecs en ont trop ils se font virer, comme Bayon chez Libération. C’est un mec qui avait une chronique de cinéma mais qui parlait de rien. Génial. Ils veulent pas se prendre la tête. Ils veulent surtout faire passer leur truc du mec qui a acheté un encart pub.

C’est triste. Parce que moi finalement c’est en lisant ton truc que j’ai voulu aller voir le film.
Et alors ?

Alors ça m’a fait le même genre de truc que quand j’ai lu l’étude de texte d’« En Attendant Godot » en terminale. J’avais pas adoré le livre, mais j’avais lu ce truc, et « WAOU ». C’était un truc que j’avais trouvé sur internet, des petites phrases isolées hyper percutantes, et là…
C’est génial ce genre de trucs. Ca te redonne du jus quoi.Ca te pose un prisme, un autre cerveau sur le film. C’est peut-être, tu sais, t’as lu des mots qui ont débloqué ton méchanisme interne, et tu te dis, « ah, ok , y’a un truc là », et alors ensuite tu le vois.

Tiens, puisque qu’on parle de Drive. Comme chez son héros, il y a en toi une dualité impressionnante, à tous les niveaux. Et notamment, on sent que tu as cette volonté, contrairement à la majorité des jeunes maintenant, de ne surtout pas dénigrer le mainstream. C’est important pour l’avenir de la musique, la cohabitation entre le mainstream et l’indé ?
Si on est vraiment fan de musique, ou de cinéma, fan de quelque chose, je pense qu’on se rappelle tous et toutes de nos premiers émois, nos premières rencontres. Comme chaque enfant, en général, t’aimes un truc hyper pété, et un truc qui par hasard s’avère être hyper bien. Et moi il se trouve qu’à 9/11 ans, j’étais fan de Prince, des Béruriers Noirs, et de Cabrel. Bon, j’écouterai pas le Cabrel maintenant. Le meilleur exemple, c’est tous les morceaux hypers mainstreams du r’n’b américain. Ils sont très souvent ultra futur! Le morceau produit par Pharrell pour Snoop Dog, Drop It Like It’s Hot…putain ! C’est un truc incantatoire, avec des samples de bouche, y’a rien ! C’est production impeccable, et c’est inattaquable, de n’importe quel coté. Et c’est mainstream. Bravo ! Donc ouais je suis pas style « ça c’est vraiment connu, donc c’est pété », parce que voilà, y’a des trucs aussi horribles comme Die Antwoord, avec des clips bizarres machin, et qui en fait aimeraient être un peu mainstream, mais non en fait ils veulent être reconnus en tant qu’artistes : Go fuck yourself ! Vous êtes horribles. Vous êtes aussi horribles que les mecs qui font du bâton du diable au festival d’Aurillac. Vos chaussettes puent les gars. Come on. Donc je pense qu’il faut vraiment assumer son coté mainstream et avec un peu de chance vous laisserez un morceau éternel pour l’humanité; :)

C’est quoi tes projets pour les 5 prochaines années ?
Trouver un trésor et essayer de faire quelques morceaux qui restent. Postérité.

Playlist

// Chanson pour boire une Pina Colada au bord de la piscine le 1er jour des vacances :

// Chanson pour regarder ses muscles dans la glace :

// Chanson à écouter dans son ipod avant d’aller taper le mec qui t’a volé ta meuf :

// Chanson pour se perdre dans la nuit :

// Chanson pour se réveiller le matin avec la plus belle fille du monde :

Aucune, la chanson c’est la fille elle-même.

Jean Nipon, discographie ici.

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