Freshmen XXL 2009 – Que sont-ils devenus ?

lundi 24 février 2014, par Sylvain Caillé.

Depuis 2008, le célèbre magazine cainri XXL s’amuse à élire chaque année une sélection non-exhaustive de dix rappeurs en passe de devenir incontournables. Au fil des années, cette sélection a pris de l’ampleur, au point de devenir une référence dans le milieu : les Freshmen XXL Of The Year. Chaque année, ces bleus représentent l’avenir de la nation en terme de rap.

Après avoir passé en revue l’évolution de la première sélection du magazine XXL, la génération 2008, on s’attaque à la promo suivante. Sur les dix rappeurs promis à la gloire éternelle, combien suscitent encore l’attention cinq ans plus tard ? Début de réponse ci-dessous.

 

BOB

2009

Âgé de 20 ans lors de sa nomination, Bobby Ray affiche déjà un background musical assez flatteur. Il vend son premier beat à 14 piges. A 18 ans, il est repéré lors d’un live dans un club tenu par T.I. et signe un mois plus tard sur le label Atlantic Records. Talent précoce. Son premier single sous AR, « Haterz Everywhere « , attire l’attention des grands et atteint presque le Billboard Hot 100 Singles. Très prolifique, B.o.B. enchaîne les projets avec une aisance surprenante. Surtout, alors que la trap monopolise les ondes d’Atlanta, B.o.B. ramène une touche funky façon « I’ll be in the Sky »  qui rappelle presque deux légendes de sa ville. Oui, on pense à Outkast. Son apparition sur le célèbre Paper Trail de T.I. – plus de trois millions de copies écoulées – l’envoie illico sur la photo de classe XXL.

2014

B.o.B. a totalement embrassé son personnage pop, celui qui lui a ouvert en grand les portes du succès. Au début pour le meilleur : son délire schizophrène sur la mixtape B.o.B. vs Bobby Ray renforce son niveau de coolitude, à l’instar d’un « No Mans Land » country-pop  sympatoche. Malheureusement, cette facette radio-friendly va rapidement annihiler son intérêt artistique. Son premier album B.o.B Presents: The Adventures of Bobby Ray cartonne auprès du grand public et donne envie de vomir aux fans de la première heure. Grâce à de puissants singles édulcorés, putain Bruno Mars, il vend plus de 500.000 exemplaires aux US en moins d’un an et sa notoriété dépasse les frontières. Une belle réussite commerciale pour celui qui devient le rappeur le plus PEGI+3 du circuit. La suite ? Un Strange Clouds aussi fade que son single éponyme, qui écoule tout de même 300 000 copies aux States. Malgré quelques minces lueurs d’espoir, « Play The Guitar » invite Andre 3000, la carrière du bonhomme désintéresse les rap addicts. En l’absence de single aussi fédérateur, les amateurs dérochent également. B.o.B tente de se maintenir en travestissant sa musique au gré des modes. Pas de bol, son troisième LP Underground Luxury tape un gros bide : à peine 75.000 exemplaires en un mois. Ça fait mal, ça fait mal.

Résultat : Pass

Qu’on adore ou qu’on abhorre, B.o.B. a prouvé qu’il avait une carte à jouer dans l’univers du rap. XXL a vu juste sur le coup. Le rappeur est taillé pour les charts et même si on aimerait crasher son putain d’Airplane avec Tyler The Creator, on ne peut pas renier l’efficacité commerciale. Heureusement, ça ne dure pas éternellement. Comme quoi, y’a une justice.

KIDCUDI

2009

Au moment de sa nomination en tant que Freshmen XXL ’09, Cudi n’a pas encore droppé son conceptuel Man On The Moon. Signé sur GOOD Music après avoir tapé dans l’œil de Kanye West avec sa mixtape A Kid Named Cudi et son tube « Day’n’Night« , Scott Mescudi trace sa route auprès des grands. Il travaille même en studio avec Yeezy et Jay-Z, respectivement sur 808s & Heartbreak et Blueprint 3. La classe. Mais c’est surtout grâce aux Crookers que l’Europe va découvrir le jeune prodige de Cleveland. Les DJs Italiens s’emparent du Day’n’Night et le propulsent au rang de hit planétaire, l’hymne officiel de l’été 2009. Dans l’histoire du disque rap, on a rarement vu une meilleure préparation de terrain pour le lancement d’un rookie album.

2014

Plusieurs millions de singles vendus et quelques albums plus tard, Cudder n’est plus à présenter. Porté par les producteurs Emile Haynie et Plain Pat, Man On The Moon impose un style emo, une mini-révolution. Une énorme fan base soutient . Que ce soit « Day’n’Night », « Make Her Say » ou « Pursuit Of Happiness« , tous connaissent un succès fou, tout comme l’album qui s’écoulera à plus de 830.000 exemplaires en quelques années. La suite, on la connaît. Happé par la drogue et emprisonné par son succès, le Cleveland boy au « Mojo So Dope » sort la deuxième partie de son histoire avec Man On The Moon II. Un album bien plus personnel et touchant, qui scorera moins que son premier volet. On tape quand même plus de 500.000 ventes. Cudderisback, et en force puisqu’il signe son projet le plus abouti. Il en profite pour diversifier ses actifs, participant à la série How To Make It In America et collaborant avec Surface 2 Air. A ce moment là Cudi réussit tout ce qu’il touche avec brio. Mais depuis, le rappeur n’a jamais réussi à retrouver le niveau qui était le sien à l’époque. En quête d’indépendance et à la recherche de nouvelles sensations, Cudi lâche ses producteurs bien-aimés pour s’allier avec son ami Dot Da Genius en 2012. Sous le nom de WZRD, ils sortent un album expérimental de moyenne facture qui ne trouvera jamais son public. Une erreur, prolongée en 2013 par son départ de GOOD Music et son troisième solo Indicud : en plus de ne pas dépasser les 250.000 ventes aux USA, il laisse un goût amer dans la bouche des fans, éternellement en attente du retour d’un Cudi inspiré.

Resultat : Pass

Le débat ne se pose pas. Cudi est arrivé en 2009 avec un style et une énergie unique. Son ascension fulgurante est aussi saisissante que sa descente aux « enfers », toutes proportions gardées. Quoi qu’il en soit XXL ne s’est absolument pas trompé en le sélectionnant pour sa Class Of ’09.

 

ASHER ROTH

2009

On va pas se mentir, il a longtemps été difficile pour un rappeur blond, blanc et gringalet, de percer dans le rap game, à défaut de s’appeler Eminem. Jusqu’à MySpace. Une plate-forme géniale sur laquelle Asher Roth met en scène un nouveau trait du rappeur : l’étudiant chill. D’abord repéré sur le web par Scooter Braun – le mec qui a découvert Justin Bieber – la légende raconte que, suite à un 16 freestylé dans le bureau de Jay-Z, Hov lui aurait rétorqué « Ok, you’re nice« . Cee-Lo et Akon reconnaîtront aussi le talent du rookie. Culotté, il transforme « Roc Boys » en « Roth Boys » sans pression. Don Cannon et Drama l’adoubent sur la tape Greehouse Effect.  Il crève définitivement l’écran grâce à l’hymne étudiant « I Love College« .  Persuadé d’avoir déniché le nouveau Eminem, bien que leurs styles n’aient rien à voir, XXL coche son nom pour sa class of ’09. En plus, son LP Asleep In The Braid Aisle a quand même craché 200 000 exemplaires dans le pays. Coolest dude de la promo.

2014

Quatre ans et demi plus tard, on attend toujours le deuxième album du rappeur. Une fois le buzz consumé, il n’a pas réussi à rebondir sur son succès éphémère. Comme bon nombre de rappeurs, il est rangé au placard par sa maison de disque et ses managers. N’étant pas considéré comme prioritaire dans l’industrie du disque, Asher s’exerce en enchainant les projets gratuits avec ses potes. Un super EP avec Nottz en 2010, une terrible mixtape produite par Blended Babies en 2011 et le volume 2 de sa GreenHouse Effect tape, toujours couvé par Don Canon et DJ Drama. A cela s’ajoute trois singles enregistrés – dont deux avec Akon et Meek Mill – et laissés consécutivement à l’abandon par ses labels. Au final, Asher Roth à toujours été prêt à dropper son second disque, c’est juste qu’il n’en a jamais eu l’occasion. Depuis peu il a décidé de se libérer des contraintes des majors puisqu’il évolue désormais en roue-libre et devrait sortir son album sophomore dans le courant de l’année 2014.

Résultat : Demi pass

Son parcours suit l’inverse du chemin classique emprunté par les rappeurs. Au lieu de sortir de l’ombre, le white boy a quitté le feu des projecteurs juste après son ascension. Involontairement certes mais le résultat est sans appel : no money in the bank. Pourtant, il donne dans la musique de qualité et ne copie-colle pas les recettes du moment, l’antithèse d’un B.o.B. Seulement, vue la pente descendante sur laquelle il se trouve, pas sur que le MC revienne au sommet un jour. Mais en a-t-il envie ?

BLU

2009

Blu c’est le gars productif de la promo. Il n’était pas encore freshman qu’il sortait déjà des projets dans tous les sens. Le plus souvent en collaboration, comme sur son premier jet avec Exile : Below The Heavens. Un masterpiece d’indie-rap acclamé par la critique en 2007. Depuis, pas moyen de passer à côté du rappeur californien. Si tu te tiens au courant des sorties musicales tu n’as pas pu le rater. Il nous a particulièrement tapé dans l’oeil en 2009 lors de la sortie de son projet Her Favorite Colo(u)r. Sensiblement plus âgé que ses collègues élus, Blu cultive à merveille son statut d’électron libre du hip hop. Incompatible avec les grosses maisons de disque, il agit dans l’underground le plus total jusqu’en 2009 où il signera finalement chez Warner pour passer un cap.  Sa prolificité, collant parfaitement avec son style unique et décalé lui vaudra une convocation dans la seconde génération de freshmen XXL.

2014

Quelques années plus tard, Blu n’a absolument pas changé. Grand amateur de collaborations, le MC remet le couvert avec Exile en 2012 pour le super Give Me My Flowers While I Can Still Smell Them, et travaille avec Nottz en 2013 sur l’EP Gods In The Spirit. Le problème avec Blu, c’est qu’on ne peut pas parler de performance commerciale. Jamais. Presque aucun chiffres de vente ne trainent sur internet, on suppose donc que chacun de ses projets s’écoulent doucement, trop doucement. Si au premier abord Blu semble être une pépite de rappeur, on s’aperçoit vite que son style le confine à un rôle mineur dans le mouvement hip hop. Il doit certainement être l’un des freshmen XXL les plus prolifiques toutes générations confondues, et paradoxalement être le moins vendeur de tous. D’ailleurs, son désaccord avec Warner ne nous étonne même pas. Deux ans après sa signature, il quitte le label sans même avoir sorti d’albums dessus. Plus tard dans une interview il n’hésitera pas à balancer « Warner sucked! Kweli left, Tick who signed the Beastie Boys left. The president was fired or left.  His son, the VP of Sire left. Them niggas got bought out by Russians who didn’t give a fuck about nothing but Rick Ross so.. ».

Resultat : Fail

Au vu des critères XXL, Blu n’a pas explosé après sa nomination, c’est même un peu l’anomalie de cette sélection. Néanmoins on peut le féliciter pour sa vision du hip hop et son authenticité. Blu ne voit pas la musique comme un gagne pain, mais comme une passion. Une idéologie que beaucoup de rappeurs actuels ont oublié. Par contre, l’Histoire n’oubliera jamais la honte digitale qu’il s’est infligé en s’adressant à Schoolboy Q. HE AINT EATIN.

FACTZ

2009

Malgré son pseudonyme sympathique, Mickey Factz est l’un des freshmen les moins connus de sa génération. Il attaque 2009 avec un statut d’outsider indépendant empilant les mixtapes depuis quelques années. Promis à un grand avenir, le rappeur réussit péniblement à dropper quelques singles salvateurs qui lui permettront d’améliorer sa visibilité auprès des majors : « Rockers » sur la bande son de Fight Night Round 4 et « Rockin N Rollin » en featuring avec The Cool Kids qui sera clippé et diffusé sur MTV. En manque d’inspiration et visiblement choqués par la puissance de ce dernier morceau, XXL pose ses cojones et appelle le MC pour rallier la cause des freshmen XXL.

2014

En 2010 il signe sur Battery Records – filiale de Sony Music – un label qui prétend comprendre sa vision des choses et voit en lui en artiste prometteur. Mais depuis sa nomination chez XXL, Mickey s’est égaré. Perdu dans les abysses du peu-ra, le bonhomme rame de toute ses forces pour exister, à coup de mixtapes et de ré-éditions. En 2012 il sort Mickey MauSe, un projet gratuit initialement prévu pour sortir sur son label, mais considéré trop artistique et donc sorti par le rappeur lui même en indé. Baladé à droite à gauche, le MC peine à s’imposer en interne dans un label qui ne le prends pas au sérieux. De fil en aiguille et à force de restructurations des maisons de disque, il reste chez Sony Music Entertainement mais cette fois-ci switch sur RCA Records, autre branche du groupe. Toujours sans succès. Fin 2013, alors que plus personne ne l’attend, Mickey Factz revient aux affaires en sortant un single