L’Original Festival et le récit du show of the year

mercredi 14 mai 2014, par Cedric. .

Histoire de tuer tout suspense, autant te le dire tout de suite : le troisième show de L’Original Festival 2014, ce lundi 12 mai, était le genre d’évènement qu’on se targue d’avoir vécu dans une vie. Et on exagère à peine. Non pas que les précédents concerts étaient décevants, loin de là ; on a bien kiffé voir Dom Kennedy, Krondon, Deen Burbigo, Ärsenik, Seth Gueko ou les XMen sur la scène du Transbordeur. Simplement, on dit qu’avec les artistes présents lundi soir et leurs prestations respectives, on a sué comme des porcs.

Joke ? La relève du rap français avec qui on a pu s’assoir une trentaine de minutes avant son set. Isaiah Rashad ? La dernière recrue de TDE, crew le plus chaud de la planète. ScHoolboy Q ? Tout simplement la tête d’affiche de cette 11eme édition du festival. Avec un tel casting, on s’attendait à ce que ça soit de la pure folie sur scène. On n’a pas été déçu, mais alors pas du tout. #showoftheyear

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Il y avait un monde de fou ce lundi soir au Transbordeur. Au bas mot, 1 300 personnes. Forcément, pour avoir une bonne place, il ne fallait pas arriver en retard. Même si le show ne commence qu’à 20h, on se pointe à 19h, histoire d’être sûr de pouvoir faire les groupies juste devant la scène quand ScHoolboy Q viendra performer. En attendant le rappeur de L.A, c’est Terror Mike qui balance du bon gros son pour chauffer la salle – retenez bien ce nom, de belles choses arrivent bientôt en collaboration avec le DJ lyonnais pour ambiancer vos soirée.

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Qu’on se le dise et quitte à faire des mauvaises blagues, Joke n’est pas venu pour se fendre la poire. Quand il débarque sur scène, ça gueule de partout et c’est avec « Majeur en l’Air » qu’il commence son show avec son pote Bip’s, bien décidé à foutre le zbeul dans la salle. Pendant près d’une heure, le Montpelliérain récite ses classiques sous la fureur d’un public qui connait par coeur les paroles de « MTP Anthem », « 501 Lunettes Cartier » ou encore de « PLM ». Les morceaux s’enchaînent comme dans une tournante et pour calmer le jeu, Joke interprète « Max B ». Comme les gones ont du coeur, ils entonnent « free Max B » quand le rappeur de Montpeul leur tend le micro. Pas le temps de chialer cependant, Joke veut finir en beauté. Il revisite le dernier Tarantino avec « Django », joue à madame soleil avec « Scorpion » et nous réapprend (une nouvelle fois) les bonnes manières avec « Majeur en l’air ». Le rappeur dont le premier album, Ateyaba, sera bientôt disponible, a comblé les quelques lacunes scéniques que certains lui reprochaient. Un set à la hauteur des géants qu’il précédait.

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Après une pause de quelques minutes, c’est gonflé à bloc que le public voit apparaitre sur scène une jeune DJ. Tout le monde se dit qu’elle doit être là pour accompagner Isaiah Rashad et que le jeune prodige devrait arriver sous peu. Mais non. À la place, c’est une jeune rappeuse qui se présente à nous. Son nom, c’est René Brown, et elle souhaite qu’on le retienne. Aucune inquiétude : après un passage comme le sien, impossible qu’on l’oublie. À l’arrière, sa DJ fait des prouesses, balance du lourd son et c’est sans se démonter que René Brown débite des lyrics à la vitesse de l’éclair avec, en point d’orgue une interprétation personnelle et démente du « Money Trees » de Kendrick Lamar. Bien qu’elle ne soit restée que 15 petites minutes sur scène, elle a tout de même réussi à se mettre les canuts dans la poche, vidéo à l’appui.

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Honnêtement, quand on a vu Isaiah Rashad débarquer sur scène, à la cool, on s’est demandé si sa performance allait être aussi explosive que celle de ses prédécesseurs. En vrai MC, il nous a donné la réponse micro en main. Ce mec de 23 ans, mais qui en fait 30, dégage une énergie folle. S’il a démarré sa prestation tout en douceur, en interprétant le tubesque « Ronnie Drake », il est rapidement monté en pression en confirmant tout le bien qu’on pense de lui. En parfaite symbiose avec le public, qu’il n’hésite pas à taquiner, le rappeur lui déclame son dernier projet, Cilvia Demo. Et pour défendre son disque, le natif du Tennesse a mis du coeur à l’ouvrage.

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Déchaîné, sautant partout sur la scène tel un jeune rockeur sous produits, il interprète « Menthol » en chantant même le refrain de Jean Deaux, « R.I.P. Kevin Miller », sous les vivas d’un public qui gueule à l’unisson : « Y’all for bitches and blunts, we live for weed and money. » Puis « Modest » et « Webbie Flow » font tour à tour redescendre un peu la pression. Pas fatigué par le show qu’il vient de fournir, même après un très énergique « Shot You Down », Isaiah Rashad gigote sur scène pendant que son DJ balance une lourde trap. Du Young Thug en veux-tu en voilà, du 2 Chainz et du Chief Keef : personne n’a envie de quitter la scène. Et pourtant, le MVP de la soirée attend son tour.

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Quand tout le monde croit voir arriver ScHoolBoy Q sur scène, c’est finalement son DJ – léger sosie de Wiz Khalifa – qui se présente sur les planches du Transbo. « Y’all wanna see Schoolboy Q ? » Chaud bouillant, le public fait savoir qu’il n’attend que ça. Mais il va falloir patienter : pendant que l’ours qui a pondu le très bon Oxymoron sort de son hibernation et enfile le bleu de chauffe, son DJ met le souk dans la fosse. Après quelques tracks bien senties et d’autres un peu moins – qui diable ose encore passer « Harlem Shake » ? -, l’un des quatre membres de Black Hippy arrive sur scène sous les acclamations d’un public survolté. Si ça se bousculait un peu devant la scène jusqu’alors, l’arrivée du man of the night est synonyme d’appel d’air : c’est la déflagration. Face à un public acquis à sa cause, le rappeur débute son show.

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Sans surprise, Quincy Matthew Hanley commence son récital avec des morceaux tirés de son dernier album. On n’a même pas le temps de bien se mettre dans l’ambiance d’Oxymoron que Q annonce la couleur : après « Hoover Street » et « Prescription », le rappeur estime qu’il a balancé assez de morceaux de son nouvel opus. « Back to the old shit » et retour sur Habits & Contradictions. Pas de quoi déconcerter le public qui a balayé les moindres recoins de la discographie du rappeur avant de venir et qui chante avec lui sur « Sexting », « Druggys Wit Hoes Again » et le monstrueux « Hands On The Wheel » qui finit d’enflammer la salle.

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Après 45 minutes d’un show haut en couleurs, et des interprétations magistrales de ses bangers – « The Purge », « What They Want » et l’inévitable « Collard Greens » – c’est le t-shirt trempée que Q se confie : « All of that is thanks to y’all. Y’all pay for my food, y’all pay for my clothes. F***k, you’re awesome. » L’Angelinos veut donc nous faire plaisir – « my hapiness is your hapiness » – et entame un dernier rush avec « Break The Bank », « Yay Yay » et « Hell Of A Night ». Le coquin nous annonce que c’est le dernier son de la soirée. Bien sûr, personne n’y croit. Comme partout où il passe, la simple vision de ce gros bonhomme avec les premières notes du sample des Chromatics en bruit de font entraîne une hystérie généralisée. Devant l’extrême enthousiasme de son audience, Q stoppe tout après les dix premières secondes, s’extasie – « Y’ALL MOTHAFUCKERZ READY FOR MAN OF THE YEAR! » – et s’offre le luxe de recommencer. Pas de place pour la fragilité devant la scène où les pogos sont légions ; ils ne prennent fin que lorsque le rappeur termine son interprétation de ce gigantesque track.

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Clairement, le kif est réciproque. Celui qu’on appelait jadis « LA’s Puffy » fait volte-face, revient sur scène pour terminer tout le monde sur « Oxymoron ». La salle est littéralement en fusion : ça se bouscule et ça gueule de partout, on craint des cadavres dans la fosse. La liesse est globale. Une ultime dédicace plus tard, l’homme tourne le dos et disparaît dans l’ombre de l’arrière-scène. Une soirée qui fait déjà date.

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On vous donne rendez-vous le 25 mai pour la légendaire venue de KRS One à Lyon, accompagné des déjantés Sticky Fingaz et Fredro Starr d’Onyx, qu’on avait déjà vus sur scène il y a deux ans. Oui, c’était monstrueux.

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